Silence : trois bandits violent une mère devant ses enfants

Violence basée sur le genre

 

 

Les 2 et 3 novembre 2024, un week-end qui restera gravé dans la mémoire des habitants de Fort National. Des bandes armées ont fait irruption, saccageant tout sur leur passage, pillant, violant et incendiant. Rose, 51 ans, mère de 4 enfants, regard empreint de douleur et de résilience, raconte son calvaire : « Je ne sais pas ce que les Haïtiens ont fait au bon Dieu, mais il semble qu’il nous le fait payer cher. Nous vivons un véritable enfer, et pourtant, on dirait qu’aucune autorité du ciel ou de la terre n’entend nos cris. »

Tentative pour obtenir un acte sexuel

Au cœur de Port-au-Prince, dans le camp du lycée Marie-Jeanne, cette mère courageuse a été contrainte de fuir son domicile de Fort National, un quartier dévasté par la violence des gangs. « Je ne pouvais pas rester là-bas. Ils sont venus, des hommes armés, sans pitié… ils prenaient tout, frappaient, tuaient. Ma maison ? En flammes. Ce que j’ai vécu, ce que mes enfants ont vu… personne ne devrait endurer ça. »

Mais avant de fuir Fort National, Rose a été victime de l’impensable : elle a été agressée sexuellement. « Trois hommes m’ont violée en présence de mes enfants. Ils m’ont détruit », lâche-t-elle d’une voix basse, les yeux embués. « Ce jour-là, j’ai perdu plus que ma maison, plus que ma paix intérieure. Ils m’ont volé ma dignité. »

D’autres tragédies

Rose, nom d’emprunt pour protéger l’identité de la victime, était une commerçante active. Devenue veuve après l’assassinat de son mari à Nazon en août 2023, elle s’est retrouvée seule pour subvenir aux besoins de ses enfants et les élever dans un environnement devenu de plus en plus incertain. « C’était un homme bon, qui se battait pour que ses enfants aient un avenir. Un jour, on m’a appelée alors que je vendais mes légumes au marché de Lalue pour me dire de venir ramasser le corps de mon mari. Des bandits l’ont tué à Nazon, » se souvient-elle, la voix étranglée par l’émotion.

Violence sexuelle stop

Peu après, son fils aîné, âgé de 19 ans, est devenu la cible des malfrats du quartier de Fort National. Les menaces pour l’enrôler dans leurs activités criminelles se sont intensifiées. « On a voulu intégrer mon premier fils dans des actes criminels. C’est un bon garçon qui travaille bien à l’école. Je suis très sévère avec lui », raconte-elle

Le deuil et les responsabilités croissantes pèsent lourd sur les épaules de Rose. Depuis cette tragédie, elle affronte de nombreux défis, non seulement financiers mais également émotionnels. Chaque jour est une lutte pour trouver des moyens de subsistance, dans un contexte où les difficultés se multiplient. Aujourd’hui, elle vit dans des conditions indignes dans le camp du Lycée Marie-Jeanne, où chaque jour devient un combat. « L’air est imprégné d’une odeur nauséabonde, l’accès à l’eau potable est rare, et il n’y a ni intimité ni confort. On dort les uns sur les autres, sur des morceaux de carton, sous des bâches trouées qui ne nous protègent ni de la pluie ni du vent, » confie-t-elle.

Ses maigres ressources ne suffisent pas pour nourrir ses enfants. « Parfois, je les regarde s’endormir le ventre vide, et je ne peux rien faire, » confie Rose, impuissante. « Ils me demandent pourquoi on vit ainsi, pourquoi il n’y a rien à manger. Ils ne comprennent pas, et moi je n’ai plus de réponses. »

Le camp est devenu pour Rose un symbole de l’abandon de l’État. Elle y côtoie d’autres familles qui, comme elle, ont fui la violence des gangs, mais qui se retrouvent piégées dans des conditions de vie précaires, exposées aux maladies, sans espoir de retour à une vie normale. Malgré tout, elle se bat pour ses enfants. « Je veux qu’ils sachent que même si tout semble sombre, il faut garder espoir. Je veux leur montrer qu’on peut survivre, même à l’impensable, » affirme-t-elle, malgré la fatigue qui se lit sur son visage.

Les violences basées sur le genre, les traumatismes, les privations, tout cela pèse lourd sur Rose et d’autres femmes comme elle. «Les campements improvisés ne sont pas des refuges ; ils sont des lieux où la douleur se mêle à la honte et au désespoir, et où les voix des victimes résonnent dans l’indifférence générale », dit-elle froidement.

À travers son témoignage, Rose appelle à l’aide, pour elle, pour ses enfants, et pour toutes les femmes qui se battent en silence. Elle rêve d’un monde où elle pourrait marcher librement sans craindre pour sa vie, d’un endroit où ses enfants pourraient s’épanouir en paix. Mais pour l’instant, elle survit, suspendue entre l’horreur passée et une misère quotidienne.

 

Wooselande Isnardin

woosebelfort@gmail.com

 

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