Par Gladimy Ibraīme
Dans un forum de deux jours que le Volontariat pour le développement d’Haïti (VDH) a organisé en partenariat avec le Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), au Karibe, les jeudi 27 et vendredi 28 juin 2024, le Premier ministre, Dr Garry Conile, a donné le ton : « Ce n’est pas la première fois que j’ai pris part à ce genre de réunion. Mais cette fois-ci, ce forum doit se poser la question : qu’est-ce que l’on va faire différemment ? Qu’avons-nous appris durant ces vingt dernières années ? »
Du haut de son pupitre, l’homme politique a fait référence à notre transition sans fin, au chaos alimenté dans le pays et qui a fini par le jeter dans un désordre sans fin.
Le constat du Dr Conille est amer : « Depuis plusieurs années, les gangs contrôlent 80% de la zone métropolitaine. Nos enfants ne peuvent pas aller à l’école en paix. Presque la moitié de notre population est en insécurité alimentaire. 500 000 personnes sont déplacées. J’ai regardé la carte d’une partie de la ville. Désastreuse. J’ai hérité d’institutions étatiques qui sont excessivement fragilisées. Nos cadres sont démoralisés. Il y a des ministères qui n’ont même pas de local pour se réunir. »
Devant ce tableau accablant, il voit pourtant poindre une lueur d’espoir : « Mais au milieu de tout ça, les groupes politiques ont pu trouver un accord. Ce sont des gens qui ont passé des années à lutter. Ils n’ont pas la même vision ; pas la même idéologie. Ils se sont réunis et se sont dits, le moment est grave. Nous devons nous entendre, construire une structure pour gouverner le pays et le sortir de là. »
Sur le socle de cet espoir, il a déclaré haut et fort : « Je suis convaincu que ce forum représente un effort remarquable de mise en œuvre des résolutions de sécurité des Nations-unies qui soulignent l’importance de la participation politique des femmes et des jeunes, notamment la résolution 13-25 qui a mis l’accent sur le rôle crucial des femmes dans la prévention et la résolution des crises. La résolution 22-50 qui reconnaît l’inclusion des jeunes dans la prise de décisions à tous les niveaux, notamment en matière de paix et de sécurité. »
Devant un parterre de membres de la communauté internationale et d’une pléiade d’organisations de la société civile venues des dix départements géographiques du pays, le Dr Conille a placé son engagement dans cette activité citoyenne : « Ce forum supporté par plusieurs institutions internationales constituent un point d’ancrage national à travers l’organisation du Volontariat pour le développement d’Haïti qui promeut une participation accrue des jeunes dans le processus de transition en cours. Les jeunes sont le présent d’Haïti non pas parce qu’ils représentent 50% de la population, mais parce que leur rage de vaincre l’adversité est une source d’inspiration pour celles et ceux qui dirigent le pays et un message national et international pour dire qu’Haïti vaincra. »
Pour une marche vers la victoire, le Premier ministre a clamé de tous ces vœux que le thème central de ce grand forum soit enfin une réalité : « La participation des femmes et des jeunes dans le processus de processus transitionnel en Haïti. » Dans cette perspective, il a insisté sur ce fait : « À travers le monde et à travers l’histoire aujourd’hui, il est largement reconnu qu’il n’y a pas de succès réellement si 50% de la population et même plus n’est pas effectivement représenté dans tout le processus. »
Une implication pour le changement du pays
Pour sa part, le représentant du Conseil présidentiel de transition, Frinel Joseph, a déclaré : « Je pense aux femmes et filles qui vivent dans les camps dans des conditions inhumaines et dégradantes. Ces deux jours d’échange et d’apprentissage et de débats constitueront un important atout à cette perspective. Nous mettons les bouchées double pour la formation du CEP devant amener à la réalisation d’élections libres, honnêtes et démocratiques afin de doter le pays de gouvernants élus au lendemain du 7 février 2026. »
Le représentant du CPT a salué, à travers Arnoux Descardes, l’homme orchestre du forum, le travail du VDH. « Pour votre implication dans le changement d’Haïti, le travail sans relâche que vous réalisez depuis la création du VDH le 16 février 1988 par un groupe de jeunes professionnels haïtiens soucieux de mettre au service de leur communauté les formations acquises à l’extérieur et pour la relance du pays, je tiens ce matin encore une fois en rendant hommage à vous M. Arnoux Descartes et à votre valeureuse équipe, qui, malgré vents et marées ont pu réaliser ce forum. »
La représentante adjointe du Bureau d’intégration des nations unies en Haïti (BINUH), Ulrika Richardson, a soutenu que la participation des femmes dans toutes les sphères de la vie nationale « est une nécessité et une obligation pour une société juste et équitable.
Pour Ulrika, le potentiel de la jeunesse haïtienne, son énergie dans la créativité, sont des atouts indispensables à la reconstruction et le développement d’Haïti. « Pour que cette jeunesse puisse contribuer à l’identification de la nation, leur participation doit dépasser le simple cadre des élections », a-t-elle déclaré.
L’intervention de la représentante du BINUH plaide pour une Haïti plus juste, plus stable et plus prospère. « Une nation où la participation active des femmes et des jeunes se réalise dans le processus décisionnel. » Reprenant les propos du secrétaire général de l’ONU, Antonio Gutierès, elle a dit : « Nous devons faire de la participation des jeunes et des femmes la norme et non l’exception », a-t-elle noté tout en ajoutant : « BINUH, dans le cadre de son mandat et toute l’équipe des Nations unies appuient tous les efforts qui tendent à stimuler et à encourager la participation des femmes et des jeunes à la vie publique du pays. »
Le directeur exécutif du VDH, Arnoux Descartes, a brossé le contexte de cet évènement qui rassemble les politiques, les membres de la communauté internationale et nationale au Karibe : « À la faveur de l’accord du 3 avril 2024, Haïti vit une nouvelle transition politique dont nous tous voudrions voir la réussite. Nous sommes donc nombreux à souhaiter ardemment que le pays profite de cette nouvelle transition pour établir les institutions démocratiques qui engageront les réformes nécessaires. Néanmoins la réussite de ce nouvel accord suppose des consensus suffisants capable de restaurer la confiance entre les citoyens et les citoyennes et les institutions publiques lesquelles consensus auront été construits dans l’inclusion. »
Dans un contexte insoutenable où la violence paralyse le pays et contraint même les personnes les plus attachées à Haïti à aller vivre sous d’autres cieux, dans un contexte où plus de 500 000 habitants sont décomptés dans la catégorie des déplacés fuyant la violence, Arnoux Descartes souligne qu’il y a un défi à relever. « Le défi tourne donc aujourd’hui autour de la nécessité de mobiliser les femmes et le jeunes, deux groupes démographiquement majoritaires à travers des réseaux d’organisation engagés dans la promotion et le renforcement de la participation de la société civile au processus politique. Les organisations membres du comité d’organisation du présent forum national entendent justement offrir leur contribution pour aider à relever ce défi. Voilà pourquoi sont mobilisés les jeunes et les femmes venus expressément des dix départements géographiques du pays. Ensemble, ils vont pendant deux jours établir un espace d’échange et de discussions interhaïtiens sur la transition politique et proposé des recommandations susceptibles d’améliorer la performance de ladite transition. »
Dans ce grand rassemblement au Karibe, Arnoux Descardes a profité de l’occasion pour annoncer les couleurs. Bientôt, le VDH organise un forum spécifique sur la diaspora. Cet évènement, a-t-il prévenu, est en cours de préparation.
Gladimy Ibraīme
gibraime@gmail.com
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