La pure fiction du droit à la santé

Matière à réflexion

Notre santé n’est-ce pas le bien le plus précieux et le plus fondamental ?

Quand nous sommes malades, le mal dont nous souffrons affecte notre vie. Pas seulement la nôtre, nos proches en sont également affectés. Et si nous avons un boulot, nous ne pouvons pas nous y rendre. Pour l’écolier aussi, il ne peut pas suivre son cours à l’école. Vous vous rendez-compte quand une maladie frappe en grand nombre plusieurs personnes dans une agglomération quelle conséquence fâcheuse elle a sur la société et l’économie d’un pays.

Pas un patient au couloir désespérément vide de l’Hôpital général.jpeg

Je viens avec tous ces éléments, en tant que citoyen, pour rappeler que le droit à la santé fait partie des droits humains qui s’énoncent comme « les droits inaliénables de tous les êtres humains, sans distinction aucune, notamment de race, de sexe, de nationalité, d’origine ethnique, de langue, de religion ou de toute autre situation. »

Dernièrement, lorsque j’ai écrit « L’hôpital général ne peut pas fermer ses portes », c’était un prétexte pour exprimer mon ouf de soulagement après avoir lu la note de l’Hôpital universitaire d’Haïti : « La direction exécutive de l’Hôpital général appelle au sens patriotique de ses employés et fixe la reprise des activités au lundi 1er avril 2024. » En relisant cette note, je pensais à des pays où les hôpitaux fonctionnent en pleine guerre. En Ukraine comme à Gaza, même combat. Les médecins montent la garde au chevet des patients.

Ce mardi 2 avril 2024, grande est ma surprise quand je lis cette note portant la signature du directeur exécutif de l’HUEH, Dr Jude Milcé :« La direction exécutive de l’Hôpital de l’Université d’Etat d’Haïti a l’avantage de vous informer que la réouverture de l’hôpital prévue pour le 1er avril 2024 est reportée à une date ultérieure, en raison de l’augmentation des turbulences au centre ville de Port-au-Prince pendant cette dernière semaine ».

Des faits

Les faits de l’actualité sont parlants : les forces de l’ordre n’arrivent pas à repousser les bandits. Les balles chantent au bas de la ville, les cadavres jonchent nos rues, les pharmacies sont pillées et incendiées dans le giron de l’Hôpital général, des hôpitaux privés sont dévastés par les bandits armés. Le 1er avril, un véhicule blindé de la police nationale d’Haïti a été incendié à quelques pas de l’HUEH.

L’hôpital général

De jour en jour, de lourdes menaces planent sur le plus grand centre hospitalier public d’Haïti qui a vu le jour en 1920, durant l’occupation américaine. Cet hôpital qui a aujourd’hui 104 ans est dysfonctionnel. Il n’arrive pas à servir la population.

Des milliers d’Haïtiens gardent l’espoir que s’ils sont malades, il y a un endroit où ils pourront se rendre pour un parfait rétablissement de leur santé.

Notre république est tombée dans la spirale infernale de la violence. Dans cette spirale, le droit à la santé figurant au chapitre IV sous la rubrique Droits économiques, sociaux et culturels dans la Déclaration universelle des droits de l’homme est remis en question.

Soyons lucide. Un État asphyxié comme Haïti peut-il garantir le droit à la santé ?

Dans ses principaux aspects, le droit à la santé suppose l’existence des éléments essentiels suivants :  disponibilité ; accessibilité ; acceptabilité ; qualité ; participation ; responsabilité.

La Constitution de l’OMS, dont Haïti est membre, reconnaît le droit à la santé.

Le maillet du juge

L’État haïtien a pris des engagements juridiquement contraignant consacrés par les instruments internationaux relatifs aux droits humains. Dans cette perspective, l’État haïtien a «l’obligation légale d’élaborer et de mettre en œuvre des lois et des politiques qui garantissent un accès universel à des services de santé qui soient de qualité et s’attaquent aux causes profondes des disparités en matière de santé, notamment la pauvreté, la stigmatisation et la discrimination.»

Ces droits humains inaliénables et fragiles résonnent dans le vide. Depuis le 29 février 2024, l’Hôpital général est fermé. Ce droit à la santé n’est pas un ticket valable quand l’État a failli à sa mission. Voilà un cas qui montre clairement qu’Haïti est en péril. Témoins du monde, Haïti crie assistance. Assistance. Secours. Haïti est en danger.  Le monde ne répond plus.

Claude Bernard Sérant

serantclaudebernard@yahoo.fr

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