Une visite du Réseau haïtien des journalistes de la santé (RHJS) à l’ancien local du ministère de l’Éducation nationale et de la formation professionnelle (MENFP), ave Jean-Paul II, a plongé notre équipe de journalistes au cœur du monde des déplacés de Carrefour-Feuilles. Ils sont plus de trois milles personnes (hommes, femmes et enfants) entassées dans des salles de classe, des autobus, sur la cour de l’ancien bâtiment du ministère, depuis que l’insécurité les a chassées de leur foyer.
Dans une promiscuité crasse, un afflux de gens vit dans un camp sans eau potable, sans toilettes suffisantes, au milieu d’une cour ponctuée de mares d’eau infestées de moustiques. Sur le torse des jeunes hommes et sur le corps des enfants qui vont et viennent dans cet espace en terre battue, des traces de lésions dermatologiques sont bien visibles. Des plaques, des taches éruptives sont enrobés de crème pour palier à cette atteinte cutanée.
La véritable difficulté dans ce camp
Les déplacés avec qui nous avons eu de longs échanges nous étonnent quand ils nous apprennent que ce n’est pas l’insuffisance et la qualité de la nourriture qui causent problèmes en ces lieux. La véritable difficulté se pose dans la question des toilettes. Navrant. Elles sont bouchées, personne pour en prendre soin. Voilà tout le drame.
Comment satisfaire un besoin physiologique comme déféquer ? La réponse coule de source : les enfants vont à même le sol, les adultes se libèrent dans des sachets en plastique qu’ils balancent dans un ravin tout proche.
Piqué de curiosité, j’ai arpenté la cour avec un chauffeur de taxi-moto qui a posé ses valises au camp depuis un mois et demi avec sa famille. Tout content de s’improviser guide, il saute avec moi à cloche pied sur des galets au milieu de nappes d’eau verte. Les yeux fixés sur l’objectif de la visite du réseau, en alerte, je deviens sensible à chaque détail. Avant de me conduire vers les lieux d’aisance malaisés, mon guide m’indique du doigt quelques sachets puants trainant encore dans la cour. Il me fait grimper sur une échelle pour voir un monticule de sachets de matières fécales au fond d’une ravine. Ces particularités, ces détails relevés dans cet ensemble, traduisent, à mes yeux, une réalité propice au choléra.
Ces conditions d’hygiène, – pour le journaliste du RHJS qui a suivi nombre de séminaires avec le ministère de la Santé publique et de la Population, l’UNICEF, l’OPS/OMS, Panos, ODELPA, et bien d’autres institutions – sont des indices. Ils permettent de détecter une menace : le cholera. Ces lieux sont propices à sa réapparition.
Le vibrion cholérique est encore là en Haïti. Face à ce défi, retournons aux fondamentaux : l’hygiène dans les camps. Nous savons bien que le vibrion trouve refuge dans les eaux, les aliments, les mains sales. Il ne pardonne pas quand il entraine des vomissements, des diarrhées sévères et des épidémies. Manifestement, le choléra est mortel.
Pour casser cette chaîne meurtrière que le choléra forme lors d’une épidémie, prônons l’hygiène dans les camps des déplacés.
Nous autres du RHJS, notre devoir est de rapporter les faits qui pourront sensibiliser tout un chacun aux mesures d’hygiène pour la population.
Claude Bernard Sérant
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