Vendredi 25 août 2023 vers le milieu de la journée, les barrières protégeant l’espace abritant, depuis tantôt deux ans, le Lycée du Cent-Cinquantenaire, ci-devant Lycée des Jeunes Filles, ont été forcées par des centaines de résidents de la communauté de Carrefour-Feuilles. Ces derniers, chassés de leur logis ont élu domicile dans cet établissement scolaire, à l’avenue Jean-Paul II.
Depuis cette matinée d’août, cet établissement compte parmi les 17 abris provisoires accueillant les déplacés de Carrefour-Feuilles dénombrés à plus de 3 000 âmes. Cet abri est un vrai furoncle en plein visage de cet artère de Port-au-Prince. Avant l’arrivée de ces déplacés, c’était l’une des voies publiques de l’aire métropolitaine à s’affranchir de l’enfer de l’insalubrité caractérisant la capitale.
Aujourd’hui, le décor est tout autre. L’invité qui arpente cet espace doit d’abord lié connaissance avec un monticule de déchets. Il s’étire sur une bonne partie de l’extérieur du lycée à quelques pas de la barrière donnant accès à l’abri.
D’où viennent ces déchets ?
Pas besoin de scruter trop loin. Ils proviennent des nouveaux locataires de cet espace surpeuplé.
Cet espace servant d’abri compte au total 3 380 personnes de tout âge, de tout sexe, selon les chiffres avancés par l’une des responsables de ce centre : Mme Francesca Beaujour. Native de Jacmel, mère de quatre enfants, cette enseignante n’est pas de tout repos dans cette promiscuité. La vingtaine de hangars, qui servaient de salles de classe, se sont convertis en dortoirs. Chacun de ces espaces doit accommoder entre 55 à 60 personnes la nuit. Le reste des occupants se contente des allées en terre battue de l’établissement, de l’habitacle des véhicules déglingués ou de la plateforme du grand réservoir de la cour pour se reposer à la belle étoile.
Une bombe à retardement
Quant aux toilettes mises à la disposition des déplacés, elles accusent un trop plein. L’afflux des utilisateurs a fini par avoir raison des installations sanitaires. Les sachets noirs ont permis à tout un chacun de se vider et de les balancer comme des ballons de basketball dans la ravine Bois-de-Chêne toute proche.
Madame Beaujour rapporte qu’en contrebas du mur du lycée, certains individus longeant la ravine ont reçu sur la tête ce coli très déplacé. Les nouveaux locataires venus de Carrefour-Feuilles ont essuyé, de la part de ces derniers, des jets de pierre à plusieurs reprises.
À l’heure où le Ministère de la Santé publique et ses partenaires mènent un combat dans la lutte contre le choléra, une telle pratique malsaine est condamnable, juge le journaliste sénior du Réseau haïtien des journalistes de la santé, Louiny Fontal, qui a arpenté plusieurs campagnes de l’UNICEF autour de la promotion de l’assainissement et de l’hygiène, à travers le pays. Fontal fait valoir que « Le vibrio cholerae ne pardonne pas. Il peut provoquer une diarrhée sévère et même entraîner la mort. Voilà pourquoi ce dépôt de matière fécale dans la ravine du Bois de chêne est une vraie bombe à retardement que les autorités concernées doivent résoudre avec célérité quand on connaît la vitesse de propagation du choléra. »
« Un cas de choléra a été constaté chez un enfant du centre. Heureusement qu’on l’a détecté à temps. L’enfant a été emmené à Médecins sans Frontière qui l’a soigné », a signalé madame Beaujour tout en espérant qu’une solution sera apportée rapidement à cette situation alarmante dans ce camp de déplacés où couvent des problèmes de santé publique.
Gary Cyprien
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