Comment un jeune technicien de laboratoire, infirmier ou médecin d’une institution non enrôlée dans le programme de riposte au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) qui attaque le système immunitaire du corps, doit-il réagir face au résultat positif d’un test de dépistage ? Comment faire pour garder son calme et surtout une posture professionnelle ? Ces interrogations me trottent dans la tête.
Avant de partager avec vous le déclic de ce questionnement incessant, je vous livre ma petite réflexion.
Avant tout, il faut admettre que même pour les plus expérimentés, communiquer les résultats du test de dépistage d’une maladie incurable peut s’avérer un exercice très difficile. Qui peut annoncer à un patient, sans sourciller : « vous êtes porteur du VIH ! ». Sans vouloir discriminer les personnes vivant avec le VIH (PVVIH), il s’agit d’un virus qu’on traîne toute la vie et surtout potentiellement mortel. Ce qui laisse présager une charge psychologique et émotionnelle importante.
Une affaire de communication
La communication des résultats du test dépistage est toute une mise en scène qui nécessite habileté et professionnalisme. En fait, outre le geste technique nécessaire à la réalisation du test de dépistage, il y a tout un processus qui entoure celui-ci (Counseilling prétest, post-test, etc.). Cette action de communication, au premier abord simple, peut être lourde de conséquences. Surtout si elle est bâclée. Comment donner cette information d’une gravité importante, en gardant l’intéressé loin de l’idée de commettre l’irréparable, tout en le persuadant de l’urgence de faire une prise en charge immédiate. Et surtout en ne montrant aucun signe d’anxiété ni d’angoisse. Voici toute la complexité de la question.
La réaction « politiquement correcte » du personnel soignant lambda face à cette situation est corollaire de plusieurs autres éléments : la formation, l’expérience et le professionnalisme de celui-ci. Sans oublier, la relation entre l’institution hôte avec l’Etat et/ou d’autres institutions affiliées au programme de riposte au VIH. Il s’agirait, entre autres, de se demander si le personnel soignant, peu importe son rang, est formé sur la prise charge du VIH, tout au moins, s’il est au courant de l’enjeu que représente le VIH/sida en terme de santé publique. Aussi est-il important de se questionner sur la connaissance ou non, voire de l’application du protocole de prise en charge émanant du Programme national de lutte contre le sida (PNLS).
En clair, il est capital de questionner la capacité technique de ceux qui reçoivent et soignent nos malades au niveau des structures de prise en charge. En ce sens, une grande responsabilité incombe à l’État. Instance de régulation par excellence, le Ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP) devrait s’assurer que ceux et celles qui sont placé.e.s dans une salle de consultation ou un laboratoire médical ont la formation adéquate et une licence. Aussi devrait-elle s’assurer que chaque institution du système de santé haïtien est habilitée et autorisée à prodiguer les soins de santé et applique les différents protocoles de prise en charge, notamment des maladies chroniques, dont le VIH.
Tout ceci n’a rien de superflu. Encore moins dans un contexte national ou sur chaque 100 personnes, au moins deux sont atteintes du VIH (EMMUS VI, 2018).
Maintenant revenons à l’évènement qui m’a interpellé sur ce sujet. Récemment un employé d’une institution sanitaire, sachant ma proximité avec les questions liées à la santé et le VIH/sida, en particulier, m’a posé cette question : « Quelle est la meilleure formule pour annoncer à un patient que son test de dépistage du VIH est positif ? ». Un peu plus tôt dans la journée, un jeune technicien de laboratoire est venu lui confier son angoisse. « Je viens de réaliser un test de dépistage du VIH, la personne est infectée. J’ignore comment le lui annoncer et je me demande si je n’ai pas été infectée en réalisant le test», s’est plainte la jeune professionnelle apeurée et angoissée. Le pire de tout cela, le patient ne savait pas la nature du test de dépistage dont elle était l’objet.
*A noter que le masculin est utilisé ici comme genre neutre.
Gladimy Ibraïme