« La lutte contre le sida, célébrée aujourd’hui à travers le monde, est pour nous l’occasion de réfléchir de façon plus appropriée sur cette problématique, à un moment où il nous faut renouveler notre engagement à lutter contre ce fléau », a déclaré le Premier ministre Ariel Henry, le jeudi 1er décembre 2022 à l’hôtel Montana, à l’occasion de la commémoration de la Journée mondiale du sida en Haïti autour du thème « Poussons pour l’égalité » ou encore « Ann kontinye travay pou tout moun gen menm dwa».
Pour le Premier ministre, qui prenait la parole devant une salle comble, « la mobilisation contre le sida doit rester entière, tout en rappelant à toutes les filles et à tous les fils du pays l’impérieuse obligation de se protéger et de protéger l’autre, puisque cette maladie qui a bouleversé l’humanité jusque dans les années 2000 continue à faire des victimes ici et ailleurs, en causant la mort de milliers de personnes, en particulier dans les pays pauvres où l’accès aux médicaments efficaces devient de plus en plus difficile. »
Dans cette lutte contre cette épidémie qui invite tous les acteurs d’agir contre les inégalités, le Premier ministre réalise que les effets de la pauvreté sont dévastateurs et alimentent la prostitution, la violence, la promiscuité, l’exclusion, l’auto-stigmatisation, l’exploitation. La pauvreté et ses corollaires qu’il a décrits sont loin de mettre fin aux inégalités et pèsent lourdement sur les leviers pour vaincre le sida d’ici à 2030. Toutefois, pour le Premier ministre, ces facteurs ne représentent pas une fatalité. Il croit que « le changement sera le fruit de nos durs labeurs, de nos travaux, de notre profond respect de la personne humaine, de la vie. » Dans cette perspective, il profite de cette tribune pour déclarer : « Nous devons, en conséquence, cesser nos luttes fratricides, cesser d’être égoïstes, pour être plutôt altruistes et travailler à l’édification d’une Haïti pacifique, solidaire, fraternelle, égalitaire. Ce n’est qu’à ce prix que nous nous affranchirons de tous nos maux, ceux qui comme le sida sont principalement liés à la pauvreté. Ayons foi en notre avenir commun et mettons-nous à l’œuvre », a exhorté le PM Henry.
Le Dr Ariel Henry a remercié les partenaires techniques et financiers, les professionnels de la santé, les travailleurs de la presse, les organisations de la société civile, les associations de PVIH, les associations de défense des droits de la femme qui s’activent d’une manière ou d’une autre à lutter contre la pandémie du sida.
Le ministre de la Santé publique, le Dr Alex Larsen, pour sa part, a attiré l’attention sur le contexte assez particulier que vit la République. Pour mener à bien cette lutte, d’après lui, « il nous faut de l’énergie, du courage et une foi inébranlable en de meilleurs lendemains, pour continuer à avancer. Car l’infection au VIH n’attend pas pour agir et s’étendre inéluctablement, elle ne connaît ni temps, ni contretemps, ni troubles politiques. »
Selon les dernières estimations, a fait savoir le Dr Larsen, « la prévalence au VIH s’établit à 1,8% chez les 15-49 ans en 2021. On estime à 4 300 les nouvelles infections, parmi lesquelles 590 enfants, soit 13%. Après avoir atteint le chiffre 7 000 en 2015, au cours des cinq dernières années, les nouvelles infections ont chuté de près de 30%. Les estimations décentralisées montrent que la couverture ARV est plus élevée au niveau des arrondissements de Port-au-Prince et du Cap-Haïtien, avec respectivement 96% et 94% de PVVIH recevant le traitement. »
Au vu de ces statistiques, note le Dr Larsen, « le chemin qui doit nous conduire vers l’élimination du sida en Haïti est encore long. »
Le directeur de l’Unité de coordination des maladies infectieuses et transmissibles du ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP), le Dr Jean Frantz Lemoine, a signalé que « la stratégie mondiale de la lutte contre le sida est une nouvelle approche audacieuse qui utilise les inégalités pour combler les lacunes qui empêchent de progresser vers l’éradication du sida. »
Cette approche, d’après le médecin, vise à réduire les inégalités qui alimentent l’épidémie de sida et à donner la priorité aux personnes qui n’ont pas accès aux services.
USA : 110 millions de dollars dans la riposte au VIH en Haïti
Le représentant du chargé d’affaires américain, qui portait la parole au nom de William Stromayer, a informé que « le gouvernement américain supporte directement le ministère de la Santé publique et de la Population dans le cadre de la lutte contre le VIH, et aussi à travers les partenaires techniques d’exécution pour atteindre les objectifs de provision de services vitaux équitables aux populations affectées et infectées par le VIH. » Par ailleurs, il a souligné qu’ « au cours de l’exercice fiscal 2022, le gouvernement américain a investi 110 millions de dollars dans la riposte au VIH en Haïti. Pour l’exercice fiscal 2023 qui vient de commencer le 1er octobre 2022, le gouvernement américain contribuera pour 107 millions de dollars au programme. »
La coordonnatrice humanitaire des Nations Unies en Haïti, Mme Ulrika Richardson, elle, ne va pas par quatre chemins : « Ce combat contre la maladie, contre la stigmatisation et la discrimination auxquelles font face les personnes infectées ou affectées par le Vh/sida ne peut pas être gagné sans le soutien des organisations de la société civile et des associations de base, des travailleurs sociaux et des activistes dont l’engagement inestimable est visible ici aujourd’hui. »
Le représentant de la société civile, Johnny Clergé, plaide pour un appui conséquent du budget de la santé en matière de la lutte contre le Vih/sida en Haïti. Il a pointé du doigt les bailleurs de fonds. Ces derniers, a-t-il signalé, diminuent les fonds à un moment où l’économie se rétracte.
Comment dire « An n kontinye travay pou tout moun gen menm dwa » quand il y a autant de freins pour mettre fin au sida d’ici à 2030 ?
Claude Bernard Sérant
Source : Le Nouvelliste (www.lenouvelliste.com)
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