La Solidarité des Femmes Journalistes en Haïti (SOFEHJ), en partenariat avec l’Institut Panos et l’Alliance des médias publiques de l’Angleterre, a organisé, le dimanche 6 mars 2002, une conférence-débat autour des enjeux et défis de la violence numérique pour les femmes vivant en Haïti. La rencontre, animée par la voix de Magic 9, Roberson Alphonse, a eu lieu à l’hôtel Kinam, Place Saint-Pierre, Pétion-ville. Les intervenants : Clervil Sandy, ingénieur en informatique, Pascale Solanges, co-fondatrice et coordonatrice générale de Negès Mawon, Laura Louis, journaliste à Ayibopost et Germina Pierre Louis du Réseau haïtien des journalistes de la santé.
Martine Isaac, la coordonatrice de SOFEHJ, a déclaré : « Aujourd’hui, chez nous, en Haïti, les femmes surtout les femmes journalistes et celles ayant une vie publique sont les plus vulnérables face à la violence numérique. Voilà pourquoi nous devons nous asseoir pour réfléchir un peu et proposer des solutions afin de pallier ce problème. »
Le numérique, une nouvelle forme de violence
Que sous-tend le vocable violence numérique ? Pour Clervil Samedi : « La violence numérique ou cyber violence ou encore cybermobbing est une nouvelle forme de violence qui a émergé avec les nouvelles technologies de l’information. La violence indépendamment de sa forme est une construction sociale voire systémique. La violence numérique l’est aussi. Les outils numériques sont un véhicule. Ils véhiculent ce qu’ils trouvent comme information dans le monde réel. La violence numérique peut prendre différentes formes : cyber harcèlement, cyber intimidation, menaces en ligne, logiciels espions etc. ».
Comment se manifeste cette violence sur les femmes en Haïti ? Intervenant depuis les Etats-Unis via la plateforme Zoom, Pasales Solanges reconnait que « la violence numérique sur les femmes, surtout en Haïti, se manifeste premièrement par l’inégalité de l’accès aux outils numériques (la quantité de femmes possédant un smartphone est moindre par rapports aux hommes) et deuxièmement par les pressions sociales vis à vis des femmes et les attaques à leur réputation afin de faire reculer le pouvoir des femmes dans les espaces virtuels. Les espaces virtuels sont des espaces publiques qui méritent d’être régulés au bénéfice de tous, car ils deviennent de plus en plus des canaux d’incitation à la violence par le biais de l’humour, la pornographie, la musique etc. »
Laura Louis, victime plusieurs fois de violences numériques, avance des statistiques pour montrer l’impact de ce fléau chez les femmes. « D’après un rapport publié par l’Observatoire des Droits de l’Internet l’année dernière, 58 % des violences numériques sont dirigées à l’encontre des femmes contre 40 % dans le camp des hommes », a-t-elle fait savoir.
La lauréate de la 7e édition du prix Jeune journaliste, Germina Pierre Louis, croit dur comme fer que « les femmes journalistes sont les plus exposées à la violence numérique parce qu’elles sont à la fois des professionnels de l’information et des femmes ». Aussi a-t-elle invité les patrons des médias à prendre leurs responsabilités vis-à-vis des travailleuses de presse et à leur donner plus de place dans les salles de nouvelles.
L’ingénieur en informatique, Clervil Sandy, conseille de passer moins de temps sur les réseaux sociaux. « Plus vous passez du temps à surfer sur Internet, à discuter avec des personnes sur les réseaux sociaux plus vous devenez vulnérables à la violence en ligne. Il existe des moyens pour se protéger, protéger vos comptes sur les réseaux sociaux. Il suffit juste d’aller dans les paramètres de confidentialité du réseau social en question pour les activer. »
Autre constat. D’après le directeur de l’Institut Panos, Jean Claude Louis : « Sur 10 images partagées sur Tik Tok, une plateforme d’échange en ligne, 8 dénigrent les femmes ».
Marie Juliane David
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