Les soins médicaux et la prise en charge psychologique post violence sexuelle ne sont pas tout à fait disponible dans le département de la Grand-Anse. En dépit des efforts de certains acteurs, l’entrave des freins persistent encore.
Les violences sexuelles, au niveau du département de la Grand-Anse sont monnaie courante. Selon Gérald Guillaume, coordonnateur de l’Initiative départementale contre la traite et le trafic des enfants (IDETTE), le nombre des victimes, ces derniers temps, est très élevé et va croissant. Pourtant, regrette-t-il, les structures de prise en charge médicale et psychosociale sont presqu’inexistantes. Le département dispose de très peu de structure hospitalière et de personnel médical qualifié. Une situation qui entrave la disponibilité, l’accessibilité et la qualité des soins obligatoires en cas de violences sexuelles.
En matière d’agression sexuelle, le temps de réaction est primordial. Pour éviter les infections sexuellement transmissibles (IST), les grossesses non désirées, notamment, il est recommandé de faire une prise en charge médicale dans les 72 heures ayant suivi l’agression. Pour les victimes des communes et sections communales reculées, il est extrêmement important de gérer ce facteur-là. « Certaines victimes doivent marcher jusqu’à trois journées pour atteindre un centre de prise en charge, à Jérémie », confie Hector Jacques, secrétaire général du Centre d’intervention en santé mentale (CISAM). « Malheureusement, il est compliqué pour les victimes de respecter ce délai, regrette le psychologue».
Le manque flagrant des centres de prise en charge n’est pas le seul obstacle en termes de prise en charge des victimes de violences sexuelles. Un ensemble de comportements sociaux visant à minimiser l’acte de l’agresseur ou faire culpabiliser la victime, entravent tout aussi bien le processus de soins. « La marginalisation, la discrimination, la stigmatisation, entre autres, forcent la victime à se réfugier dans le silence et à ne pas chercher une assistance médicale », dénonce Jacques tout en soulignant que les structures de prise en charge peuvent être aussi une source de stigmatisation.
Un autre frein : le profil des victimes
A en croire le coordonnateur de l’IDETTE, Gérald Guillaume le profil des agressés ne facilite pas non plus la tâche. « Les victimes que nous enregistrons au niveau du département de la Grand-Anse sont généralement âgé entre 2 à 17 ans », s’indigne-t-il.
Pour Dr Boutroce Gally Pierre de la Brigade d’intervention médicale (BIM), l’âge des victimes peut constituer un frein non négligeable dans le processus de soins. Très souvent les enfants n’ont pas conscience de l’agression, ils ne mesurent pas la gravité de l’acte ni des conséquences qui en découlent. « Certaines fois, ils sont carrément contraints de garder le silence », regrette-t-il.
Assez souvent, lorsqu’on découvre que l’enfant a été victime de viol, il est déjà tard. « Certaines fois, au moment où les parents amènent les enfants à l’hôpital pour d’autres problèmes, on constate que l’enfant est active sexuellement, indique Dr Boutroce. En questionnant l’enfant seul à seul, on découvre qu’il avait subi un viol. Généralement, on est déjà très loin des 72 heures, le délai idéal de prise en charge pour ce genre de cas », se plaint le médecin.
En dépit des défis à surmonter, plusieurs organisations de la société au niveau du département se mettent en quatre pour tenter d’accompagner les victimes à partir de leurs moyens de bord. L’IDETTE, la BIM, la CISAM, entre autres, sont sur tous les fronts. Avec le support de certains partenaires, elles arrivent à mettre en œuvre beaucoup d’actions en lien avec la prévention, la prise charge médicolégale et psychosociale.
Au niveau de la Grand-Anse, les besoins restent énormes, en termes d’accès des victimes de violences sexuelles aux soins de santé et à une prise en charge psychologique.
Décidément, autant il est important de résoudre les problèmes liés à la stigmatisation et à la discrimination des victimes, autant tous les intervenants s’accordent sur le fait qu’il est urgent d’améliorer la disponibilité et l’accessibilité de l’offre médicale et psychosociale.
Roseline Daphné Décéjour
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