Après des années de lutte acharnée contre le VIH, le cap est maintenu sur l’éradication de ce fléau planétaire. Un objectif qui n’est pas envisageable sans l’élimination de la stigmatisation et la discrimination, notamment à l’égard des populations-clé.
Depuis environ 40 ans, membres d’association, soignants, séropositifs, livrent un combat acharné pour le respect des droits des personnes vivant avec le VIH (PVVIH). Ils bataillent sur tous les fronts pour assurer l’accès des personnes infectées aux soins de manière gratuite et efficace.
Selon les données du Ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP), aujourd’hui environ 103 000 PVVIH sont sous traitement antirétroviral (ARV). Un résultat qui réjouit Malia Jean, présidente de l‘Association des Femmes Haïtiennes Infectées et Affectées par le VIH (AFHIAVIH). Toutefois, elle estime q
u’il y a encore beaucoup à faire, beaucoup de freins à enlever. « Pour les 103 000 PVVIH sous médicament, il y a environ 150 000 à 160 000 personnes atteintes du virus VIH », un écart regrettable souligne-elle.
Cet écart, selon Dr Marie Collette Alcide Jean-Pierre, spécialiste en prise en charge des maladies infectieuses et clinicienne de l’Université de Georgetown (GU), est dû en grande partie au fait qu’un nombre important de personnes a abandonné leur traitement. Un abandon provoqué par divers facteurs, notamment la stigmatisation et la discrimination, explique le Dr Jean-Pierre. Un avis largement partagé par la défenderesse des droits des PVVIH, Malia Jean.
En quoi la stigmatisation et la discrimination peuvent-elles constituer des freins à une bonne prise en charge du VIH ?
« Une bonne prise en charge implique que le patient reste dans le soin », soutient Dr Jean-Pierre. Pour cela, il lui faut un espace sécuritaire et de bonnes dispositions. « Le patient jugé à cause de son statut sérologique positif ne se sentira pas en sécurité ni accompagné. Dès le premier contact avec le personnel soignant, il peut être poussé à l’abandon », regrette-t-elle. En ce sens, elle estime que chaque personne détectée positive au virus VIH devrait être bien accompagnée du point de vue psychosocial, bien entourée, supportée et soignée. « Alors que dans les structures hospitalières, très souvent celui-ci est d’avantage repoussé qu’accueilli par le personnel », déplore-t-elle.
En réponse à ce problème, Mme Jean croit que les organismes nationaux et internationaux doivent se pencher sur la nécessité de former le personnel de santé. De l’avis de Mme Jean, ces intervenants constituent un maillon très important dans le processus de rétablissement des patients. Quels en sont les causes ? « Premièrement par rapport à la proximité des soignants avec les PVVIH. Ils sont le premier contact de ces derniers avec le circuit de prise en charge. Et deuxièmement à cause de l’impact de leur travail et celui qu’eux-mêmes peuvent avoir sur la vie du patient en tant que patient et en tant que personne », souligne la présidente de l’AFHIAVIH.
En ce sens, les campagnes de sensibilisation à la tolérance et aux respects des droits des PVVIH ne doivent pas être le programme d’un quinquennat, mais un projet durable, préconise Mme Jean. De nouvelles générations naissent… Elles auront besoin d’apprendre sur le virus et comment traiter les personnes infectées et affectée, conclut-elle.
Le traitement antirétroviral empêche le virus de se multiplier. Il permet au système défense de la personne infectée par le VIH de récupérer, d’éviter le développement du sida et la transmission du VIH. D’où la fameuse équation I=I, indétectable = intransmissible. Il ne s’agit point d’un idéal ou d’un objectif inatteignable. Chaque PVVIH peut y arriver s’il est suffisamment soutenu et encouragé à rester sous traitement. Et ceci implique d’éliminer la stigmatisation et la discrimination envers les PVVIH et les populations-clé, conclut Dr Marie Collette Alcide Jean-Pierre.
Gladimy Ibraïme