Par Abner Septembre, Ministre, Sociologue, Chercheur et Praticien en Sociogronomie
Le COVID-19 nous impose des restrictions, son vocabulaire et change tout court notre quotidien. Ceux qui font le confinement restent à la maison, dans un espace très délimité et ne sortent que pour un besoin précis. Ceux qui ne le font pas continuent de sortir, certains en prenant des précautions et d’autres en menant un train de vie quasi normal comme des résignés. Pour les écoliers en particulier, la vie se limite à la maison entre la routine et des travaux scolaires. Un changement de paradigme s’impose. En ce temps marqué par le COVID-19, faisons de la nature la meilleure école pour nos enfants et les jeunes, qu’ils soient écoliers, étudiants ou non.
L’environnement peut être lointain ou proche. Lointain, on peut vivre une aventure extraordinaire de découverte
et d’apprentissage, grâce à des visites de sites. On peut apprendre sur la faune et la flore ; sur le patrimoine
historique et culturel ; sur des activités sylvicole, agricole et pastorale ; sur des activités de conservation de sol sur
les pentes, utilisant les courbes de niveau, de compostage et d’autres, tout en y participant.
Malheureusement, le COVID-19 nous interdit de tel déplacement et donc ces activités dans la nature, le plus grand
laboratoire pour des cours de chimie, de biologie, de mathématique, de botanique, de géographie, d’histoire, de
sociologie, d’agronomie, de géologie, d’économie, de sciences de la terre et de la vie, voire notre meilleur musée
de sciences naturelles et d’art de tous les temps, etc. A défaut, pour une éducation relative à l’environnement et à
l’écocitoyenneté, il serait bon de développer des modules virtuels comme, par exemple, un film documentaire sur
les oiseaux endémiques d’Haïti ou de l’île, sur nos grottes, nos bassins, nos chutes, nos réserves de la biosphère,
etc. En cela, Arnold Antonin a fait école par son film documentaire soutenu par le Ministère de l’Environnement :
« Ainsi parla la mer ». On peut aussi produire et diffuser des feuilletons sur des sujets environnementaux à grand
suspens, qui accrochent et égaient la vie familiale. Ces documentaires bien conçus constitueraient autant un
précieux sujet de conversation sur l’environnement qu’un puissant remède contre le stress, l’anxiété ou l’angoisse.
Proche, l’environnement est ce qui nous entoure là où nous habitons. On peut sortir sur la cour observer les
papillons, les oiseaux, les chenilles, les vers de terre, la pluie, le vent, les feuilles qui tombent et comprendre la
pesanteur, voire la loi de la relativité, le ciel, la montagne, les changements qui s’opèrent d’un jour à l’autre, faire
des recherches dans un dictionnaire, les documents de référence ou sur internet, mais aussi parler avec des gens
expérimentés, prendre notes et faire des comparaisons, puis en discuter en famille sans stress et sans pression
aucune. On peut sortir sur la cour pour faire la lessive, et profiter du soleil pour une meilleure santé contre le
COVID-19 et faire sécher les linges sans frais. On peut aussi découvrir des recettes culinaires, des plats
gastronomiques, voire participer à leur préparation et, comme digestif, initier les enfants à des infusions aux vertus
médicinales insoupçonnées. Le soir, autour du feu ou de la lampe, on raconte des histoires proches de
l’environnement comme, par exemple, « l’enfant et l’oranger », le « Zombi admirateur de la pleine lune ». Le but
est double maintenir en équilibre la vie familiale et soigner la proximité avec l’environnement.
On peut planter un arbre en famille, lui donner un nom et en prendre soin à tour de rôle, tout comme pratiquer
l’horticulture à la maison et apprendre sur les plantes. Le jardin garde-manger, optimisé par le bac de production
(de légumes, de tubercules, de plantes ornementales, aromatiques et médicinales) et la végétalisation des toitures (production floricole, fruitière, légumière), est la clé. Il s’agit bien de rester à la maison, d’investir tous les
espaces (mur, roche, toiture, cour, pot, matériels recyclables), de cultiver son jardin à l’horizontale et à la verticale,
en suivant un itinéraire technique. Dans le cadre du confinement, le jardin garde-manger peut contribuer non seulement à la sécurité alimentaire et à l’éducation environnementale, mais aussi servir de passe-temps pour les enfants et de régulation psychologique de l’humeur des personnes qui s’ennuient rapidement de l’intérieur ou d’être inactives.
Bref, en ce temps du COVID-19, que la nature soit notre principal guide. Investir en partie notre temps dans cette démarche pédagogique, c’est
« bâtir un nouvel être humain au service de l’environnement », pour une meilleure qualité de vie. Moi, en tant que ministre, j’ai déjà construit et installé, sur ma galerie à Port-au-Prince, mon bac à
légumes. Je veux continuer à expérimenter et à apprendre. Bientôt, je
pourrai consommer les laitues de mon bac à légumes, ce pour un mois.
Pourquoi pas vous aussi ? On pourra se compléter et échanger.
Abner Septembre, Ministre, Sociologue
Chercheur et Praticien en Sociogronomie