Santé sexuelle et reproductive en Haïti, un enjeu majeur

«La santé sexuelle et reproductive (SSR) affecte-t-elle profondément le développement social et économique d’un pays? » lance Christina Julmé aux journalistes prenant part à l’atelier qui a lieu, le jeudi 11 avril, à l’hôtel Best Western, autour du thème : « Informer sur la santé sexuelle et reproductive en Haïti, comment et pourquoi? »

La jeune responsable de communication de l’Organisation haïtienne de marketing social pour la santé (OHMaSS) insiste. Plusieurs journalistes, – l’un après l’autre, tentent une réponse. En condensé, ils estiment qu’on doit être bien informé pour se protéger contre les maladies sexuellement transmissibles dont le vih/sida et d’avoir des enfants quand on veut; surtout lorsqu’on se sent physiquement, moralement et économiquement prêt pour aborder cette nouvelle phase dans sa vie. Aussi lorsqu’un nombre de personnes brûlent cette étape sans penser aux conséquences, chaque acte a un impact sur la société, particulièrement l’économie

qui affecte tous les facteurs de la société.

Debout, parlant aux journalistes assis autour d’une longue table dans la salle de conférence de l’hôtel de Pétion-Ville, Christina Julmé rappelle que la santé sexuelle et reproductive est un sujet qui doit être au cœur de leur préoccupation journalistique, car ce sujet affecte la démographie, nos ressources et notre environnement. Enjeu majeur pour notre équilibre économique et social, ce sujet n’est pas un jeu.

La santé sexuelle et reproductrice, fait savoir Christina, participe aussi dans un état

de bien-être. On ne fait pas seulement l’amour pour avoir des enfants, une certaine jouissance accompagne cet acte, insiste cette monitrice en accord avec les idées de son temps. Pour être bien aise sexuellement, toutes les mesures de sécurité doivent être prises pour éloigner le stress. D’où les méthodes de planning familial, avec son éventail de prescription.

Dans sa présentation affichée sur grand écran, elle lit à haute et intelligible voix : « La santé sexuelle et reproductive englobe la santé et le bien-être dans les domaines liés aux relations sexuelles, aux grossesses et aux naissances. Il traite des aspects les plus intimes et privés de la vie des personnes sur lesquelles il peut être difficile d’écrire et de discuter en public. » Qu’est-ce que ce point de vue entraîne en conséquence? Elle répond : « Le public comprend mal de nombreuses questions de santé sexuelle et reproductive. En outre, les sensibilités socioculturelles et les

tabous entourant la sexualité empêchent souvent les jeunes à rechercher des informations et des soins/services »

Christina, en bonne communicatrice, invite les journalistes à animer la séance. Questions et réponses se succèdent.

– À quel âge d’après-vous les jeunes haïtiens et haïtiennes débutent leurs vies sexuelles?

– En Haïti, 11 millions de personnes dont 35.9% ont moins de 15 ans. L’âge médian est de 23 ans.

On apprend, l’oreille attentive que c’est à cet âge que la plupart des gens devient actif sexuellement. Et aussi que c’est une période cruciale pour informer les jeunes

sur la santé sexuelle et reproductive et aux risques pour leur santé.

 

Quels sont donc ces risques?

« Ces risques incluent le vih/sida et d’autres infections sexuellement transmissibles (IST), les grossesses non-désirées, les avortements pratiqués dans de mauvaises conditions qui peuvent mettre leur vie en danger. »

On apprend que les jeunes femmes sont environ trois fois plus exposées à contracter le vih que les hommes et que les femmes sont biologiquement plus

susceptibles que les hommes hétérosexuels à être infectés.

À quoi est dû cela? « Leurs partenaires sexuels ont tendance à être plus âgés et ont déjà eu des relations sexuelles non protégées ; Les jeunes femmes, quant à elles, sont souvent incapables de négocier des rapports sexuels protégés et l’utilisation du préservatif. Il en résulte que les jeunes femmes n’ont souvent pas accès aux services complets SSR.

Risques de grossesses non-désirées

Au cours de la journée, les chiffres ont défilé à l’écran. On y lit : « 10% des adolescentes ont des naissances non-désirées; plus d’1 millions de filles et de

femmes âgées entre 15- 49 ans ont un besoin contraceptif ; les adolescentes qui accouchent risquent davantage de mourir à cause des complications qu’une femme dans la vingtaine ou la trentaine; les moins de 16 ans sont plus à risque (fistule et dommages permanents à leurs organes reproducteurs.)

L’effet papillon

Christina Julmé a utilisé la métaphore de « l’effet papillon » pour lier et donner force aux différents points abordés. Pour elle, les filles que la société a laissé sans éducation en marge du développement sont une véritable bombe à retardement. Si le simple battement d’ailes du papillon n’a aucune conséquence sur l’atmosphère, dans certaines conditions, voire dans certains contextes, il peut

provoquer une tornade, voire de grandes catastrophes.

 

Prenant appui sur l’Enquête Mortalité, Morbidité et Utilisation des Services (EMMUS-VI), elle soutient : « Sans éducation, les filles commencent à avoir des enfants très tôt, ce qui peut compromettre leur santé et limiter leurs chances d’ajouter de manière productive au développement de leur communauté et de leur pays en renforçant négativement les rôles attribués aux sexes. De plus, les mères adolescentes sont plus susceptibles d’être pauvres que les femmes qui retardent leurs grossesses. Les filles et les jeunes femmes meurent en donnant naissance, leurs enfants deviennent orphelins. Ces filles doivent s’occuper de leurs frères et

sœurs, elles abandonnent l’école. »

N’est-ce pas là un tableau vivant de notre République que l’enquête EMMUS 2016- 2017 dépeint. Pour porter la question de la santé sexuelle et reproductive dans l’espace publique, Christine Julmé, convie les journalistes à déconstruire les tabous, à aider les jeunes, surtout les jeunes femmes à ne plus avoir peur ni honte de leur sexualité et les pousser à vivre une sexualité responsable et épanouie.

La responsable de communication d’OHMass n’en finit pas d’inciter ses paires à se lancer dans ce combat : « Demandez des comptes aux gouvernements en suivant les progrès dans ce domaine. Formez-vous et développer votre expertise dans le domaine de la santé sexuelle et reproductive. Attirez l’attention des personnes susceptibles d’influencer les politiques de santé publique sur les questions de santé sexuelle et reproductive. Un flux continu d’informations est nécessaire pour sensibiliser les divers publics. »

 

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